2000-06-28
Aranei-Orbis


La Mort, l'Éternité


Florilège poétique par Le Grimaud


Deux ans déjà que j'ai ouvert ce thème et que je n'y ai rien introduit. Je n'ai trouvé que lamentations déjà lues; déjà entendues. L'ennui, jusquà ce jour où fouillant sur Internet, quelques vers à l'encontre de tout ce que j'ai lu, une approche gaie et irrévérencieuse, un pied de nez.

Pour ouvrir ce thème un poème très original signé Marie de France, À quoi ca rime. Les premiers vers pourraient laisser croire qu'elle va tourner la mort en dérision et puis retournement de situation le chemin de l'éternité s'ouvre à nous, sous l'œil du propriétaire.

Sur la mort, toujours du même auteur, je découvre quelques jours plus tard Fantômes. Toujours autant d'impertinence pour un envol vers un ailleurs.

La poésie de Marie de France est tout sauf triste. Profitez de l'occasion allez vite sur son site découvrir une poésie pleine de vie, moderne qui avec des mots simples traite d'une manière personnelle des thèmes que les autres poètes ont ignorés ou elle les évoque d'une manière totalement neuve. Une poésie de la distanciation par rapport à la vie, une simplicité qui ferait croire à de la candeur, un regard rieur et décapant qui pourront surprendre, qu'il fait bon respirer comme une nappe de brume dans la campagne au lever du jour.



 
 
 

L'Idée
 

Si notre vie est moins qu'une journée
En l'éternel, si l'an qui fait le tour
Chasse nos jours sans espoir de retour,
Si périssable est toute chose née,

Que songes-tu, mon âme emprisonnée ?
Pourquoi te plaît l'obscur de notre jour,
Si, pour voler en un plus clair séjour,
Tu as au dos l'aile bien empennée ?

Là est le bien que tout esprit désire,
Là le repos où tout le monde aspire,
Là est l'amour, là le plaisir encore.

Là, ô mon âme, au plus haut ciel guidée,
Tu y pourrras reconnaître l'Idée
De la beauté, qu'en ce monde j'adore.

Joachim Du Bellay, L'Olive


 
Note

Selon la doctrine de Platon, les objets réels que nous voyons ne sont que des ombres, des reflets d'un monde éternel des Idées, dépositaire des modèles des objets. Par exemple, les cercles que nous voyons, que nous traçons sur nos cahiers de géométrie ne sont que les reflets de l'idée de cercle. Qui a pu même, un jour, tracer une droite infinie ? Pourtant l'idée, le modèle et son infinitude existent.

Pour Platon, nos sensations ne sont que des apparences. L'âme éternelle qui a vécu avant nous dans le monde des Idées en a gardé des souvenirs. Elle a le pouvoir d'accéder directement à la contemplation des Idées. Lorsque l'âme sera en quelque sorte débarassée du corps terrestre, elle retournera dans le monde qu'elle a connu. Elle y retrouvera l'Idée de la beauté adorée par Du Bellay

On peut penser que les âmes des poètes accèdent plus souvent que celles des autres hommes à la contemplation du monde des Idées et que dans leurs vers, ils décrivent le souvenir de leurs âmes. Leur inspiration ne serait alors que l'émergence de ce souvenir ; le besoin d'écrire, l'aspiration à créer dans le monde réel des parcelles du monde des Idées.



 
Échanges sur les correspondances entre Le Coin du poète, animé par Josette Perlin et la rubrique Art des mots d'Aranei-Orbis, animée par Le Grimaud.

Voyageur en poésie ne te croit pas obligé de lire tout ce qui suit. Ce n'est pas indispensable pour goûter la poésie, sa lecture peut seul y contribuer un peu.

Pour d'autres, l'inspiration serait l'aptitude des poètes à établir des correspondances que d'autres hommes ne verraient pas d'eux-mêmes. Dans ce contexte Correspondances de Baudelaire est incontournable puisqu'il est en bonne place dans tous les manuels scolaires de littérature. On peut penser qu'il a apporté un renouveau en matière poétique comme nous expliquent les commentaires qui accompagnent ce poème chez Le coin du Poète. Mais, cela conduit comme le dit Arthur Rimbaud à une sorte de « sorcellerie évocatoire ». Le côté sorcellerie, ce monde invisible que les poètes, sortes de prêtres qui révèleraient ce monde me dérange, sans parler de l'illuminisme qui à mon sens n'apporte pas grand-chose par rapport à la doctrine de Platon.

Les « correspondances » existeraient-elles par elles-mêmes, indépendemment de l'intervention de l'homme. Assurer qu'elles préexistent reviendrait à dire qu'un créateur les aurait conçues et mises en place. Il ne resterait alors plus qu'à l'homme à les découvrir. Nous aurions d'un côté les scientifiques qui perceraient le mystère du monde par la raison et de l'autre les poètes qui en révéleraient des aspects au grè de leur inspiration.

Pour ma part la nature n'a rien à dire à l'homme. Il s'y est mantenu car Dame Nature est ainsi faite que seuls ceux qui se soumettent à ses règles survivent. Alors le poète ? Le poète est confronté à cette nature, il se crée un monde imaginaire à l'image de son aspiration. Alors, il cherche ce qui le charme, ce qui contribue à ce monde meilleur auquel il aspire. Il appelle beau tout ce qui le rassure dans cette quête. 

L'homme a hérité de ses ancêtres animaux l'instinct de perpétuer l'espèce qui a choisi le mode de reproduction sexuée. L'homme a besoin de la femme. Si d'une manière générale, les femmes vues par les hommes n'étaient pas attirantes et inversement les hommes pour les femmes, il n'y aurait pas eu d'être humain. L'être humain de l'autre sexe participe à l'amélioration du monde puisqu'il satisfait au moins au stade animal de satisfaire ses instincts. Donc majoritairement, l'être de l'autre sexe est beau. Mais le beau n'a pas la même forme suivant les sexes. L'homme imagine-t-il la femme à son image et la femme, l'homme à la sienne ? Le poète imaginera la femme fleur car la fleur ne lui veut pas de mal. La poétesse imaginera l'homme arbre qui la protégera (je le suppose car je ne peux parler au nom des femmes).

 

Ma chambre
 
Ma demeure est haute,
Donnant sur les cieux ;
La lune en est l'hôte
Pâle et sérieux.
En bas que l'on sonne,
Qu'importe aujourd'hui ?
Ce n'est plus personne,
Quand ce n'est pas lui !

Aux autres cachée,
Je brode mes fleurs ;
Sans être fâchée,
Mon âme est en pleurs ;
Le ciel bleu sans voiles,
Je le vois d'ici ;
Je vois les étoiles,
Mais l'orage aussi !

 Vis-à-vis la mienne
Une chaise attend :
Elle fut la sienne,
La nôtre un instant ;
D'un ruban signée,
Cette chaise est là,
Toute résignée,
Comme me voilà ! 

 

Marceline Desbordes-Valmore
 

Charles Baudelaire disait : « Mme Desbordes-Valmore (1786-1859) fut femme, fut toujours femme, et ne fut absolument que femme ; mais elle fut à un degré extraordinaire l'expression poétique de toutes les beautés de la femme...  »
Je ne connais pas les circonstances qui ont conduit Marceline Desbordes-Valmore à écrire ce poème. Il évoque en mois la séparation définitive, la mort d'un compagnon aimé.

 
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Florilège poétique par Le Grimaud

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